« Rue de l’Espérance, 1935 », deuxième volume de la grande saga historique et policière sur le Front populaire. Le conseiller du 13e arrondissement de Paris, Alexandre Courban, ne lâche pas l’affaire. Cette période le passionne toujours autant. Cette fois, il nous entraîne dans le monde de l’aéronautique de l’entre-deux guerres. Et comment les grandes puissances européennes se sont fait concurrence sur fond de lutte idéologique.
La dynamique reste la même. Le commissaire Bornec, homme passe-muraille consciencieux, fait son boulot, il tente de résoudre des meurtres. Gabriel Funel, quant à lui, enquête pour son journal l’Humanité sur le sort des ouvriers. Par la magie du romancier, les deux finissent toujours par se croiser, voire se retrouver. André Legendre est un dessinateur apparemment sans histoire. Il gît pourtant dans le wagon rouge de première classe du métro, égorgé. Le couteau est enfoncé jusqu’à la garde dans le cou du macchabée. Bornec doute d’emblée que ce soit un suicide. Le manche du couteau l’intrigue. Il a été fabriqué à partir d’une corne animale. Bizarre de laisser ça sur place, se dit le commissaire. On appelle ça un arburesa et il est typique de Sardaigne. Bornec ne le sait pas encore. Lui, n’y voit qu’un message ou une signature. À cette époque, on n’est pas très regardant avec les procédures. Bornec se rend au domicile du défunt, obtient la clé grâce à la voisine et pénètre dans l’appartement. Il découvre une grande table à dessin avec de grandes feuilles de papier roulées les unes sur les autres. Bornec s’en détourne. Il aura tort. De son côté, Gabriel Funel poursuit son travail journalistique qui a toujours pour objectif premier de défendre les ouvriers. Cette fois, il navigue dans le milieu aéronautique. Parce que derrière le discours officiel et lénifiant servi à l’occasion du Salon de l’aviation au Grand Palais à Paris, les conditions de travail des ouvriers sont éprouvantes. C’est Luigi Balboza le syndicaliste qui lui a encore rappelé dernièrement. L’homme est son contact au syndicat antifasciste de l’usine de Gnome et Rhône.
On retrouve la thématique de la lutte des classes chère à l’écrivain mais il prend aussi le temps de nous dévoiler un autre combat : celui des fascistes et des antifascistes. Sous les traits d’un tueur à gages qui a l’art de se travestir pour mieux disparaître. Que vient faire ce dessinateur mort dans ce combat idéologique ? Le récit d’Alexandre Courban est un billard à bandes multiples. Avec en prime, un personnage féminin qui prend son envol dans un monde clairement dominé par ces Messieurs. La jeune Camille Dubois, ancienne peseuse de la raffinerie de la Jamaïque, travaille désormais à L’Humanité. Elle rêve aussi de devenir photographe. Elle s’entraîne d’ailleurs tous les jours. Et elle a déjà des photos qui feront parler d’elle. Alexandre Courban semble avoir une connaissance encyclopédique de cette période historique française. Elle lui a permis de franchir le cap du deuxième volume d’une série décidément bien partie.
« Rue de L’Espérance, 1935 » de Alexandre Courban, Éditions Agullo, 289 pages, 19,90 euros.