« 2054 » d’Elliot Ackerman et James Stavridis : l’avenir de mal en pis

Nous avions laissé Elliot Ackerman et l’amiral James Stavridis en 2034. On les retrouve en 2054. La guerre nucléaire entre les États-Unis et la Chine a mis KO la puissance américaine. Politiquement, le mensonge a refait surface comme au bon vieux temps du Watergate. Pas question d’annoncer publiquement que le président est mort, assassiné. Dans cette grande époque de manipulation, il vaut mieux faire diversion. Décidément, rien ne va en s’arrangeant dans leur monde à venir chez les deux compères.

Un nouveau Grand Jeu. L’ordre mondial aux mains du chaos. Poutine regarde avec rage, sa grande amie la Chine qui lui a piqué la partie est de sa Sibérie. Un outsider très porté sur la technologie a repris de vives couleurs : le Japon qui grâce à l’intelligence artificielle, la robotique et l’informatique quantique a pu compenser la diminution du nombre de travailleurs en raison d’une population déclinante et une xénophobie quasi pathologique. Un autre pays talonne la nation nipponne : le Nigeria, le pays le plus peuplé de ce continent africain. Le Nigérian James Mohammad se tient prêt. Il a flairé le sens du vent. « Une vaste partie de la géopolitique avait déjà commencé à tourner moins autour des alliances militaires, ou même commerciales, que des alliances technologiques. Au lieu de se battre par procuration dans des pays tiers, comme l’avaient fait les États-Unis et l’Union- soviétique un siècle plus tôt, les champs de batailles des « guerres par procuration » actuelles étaient les laboratoires quantiques et de biotechnologie du monde entier. » Cette fusion porte un nom : La Singularité. Cela équivaudrait à une « explosion de l’intelligence » en faisant fusionner la biologie et la technologie. Exemple : les molécules seraient de nouvelles micropuces. Et cette édition génomique à distance permettrait de manipuler le corps afin qu’il s’améliore de façon autonome.

Ça, c’est sur le papier. Dans la vraie vie, il y a d’abord une fuite de la séquence clé du code de La Singularité sur un site conspirationniste. Puis la mort bizarre du président américain Castro. Soi-disant d’une crise cardiaque. Pour Mohammad, il n’y a aucun doute, le monde vient d’assister sans le savoir au premier assassinat à distance. Deux hommes sont en pointe sur la question. BT, Big Texas, de son vrai nom Dr Christopher Yamamoto. Et Ray Kurzweil, un spécialiste des thérapies géniques capables de régénérer les tissus cardiaques. L’homme de sciences a disparu de la circulation depuis quelques années. Il proposait un traitement au croisement de la biologie et de la technique. Une avancée scientifique décortiquée dans un ouvrage Humanité 2.0 et dans lequel l’auteur prédisait la possibilité de télécharger l’esprit humain. La Singularité offrait alors de multiples champs de possibilités : une arme nouvelle et meurtrière, un outil de domination pouvant cibler une personne comme Castro, ou un groupe ? Encore plus fou, en téléchargeant le cerveau, pouvions-nous devenir immortel ? Ray Kurzweil va devenir celui que tout le monde recherche. Julia Hunt, la fille de feue l’amirale Sarah Hunt, est sur la sellette après avoir transmis à un sénateur ambitieux un rapport des services secrets qui parle justement de cette avancée révolutionnaire. Le Dr Chowdhury, qu’on avait laissé dans le précédent roman de retour en Inde, est mourant. Son cœur est en train de le lâcher. Il y a très longtemps, il a croisé la route de ce Kurzweil. Il sait qu’il peut faire des miracles. Il décide avec sa fille Ashni de le retrouver. Il ne va pas être tout seul. Un voyage qui va conduire tout ce petit monde au fin fond du Brésil. Une dystopie assez flippante. Après s’être attaqués à l’effondrement politique des grandes nations mondiales, les deux auteurs ne nous laissent guère de chance. En dessinant un futur où la science, éternelle terrain de jeu des hommes, serait encore une fois détournée de son objectif initial pour en faire une arme meurtrière au profit d’une minorité dominante. Au fond, rien de nouveau.

2054 par Elliot Ackerman et James Stavridis, traduit de l’Américain par Janique Jouin-de Laurens, 352 pages, 24,50 euros.

 

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