« Le Dossier 1569 » de Jørn Lier Horst : cold cases pour enquêteur obstiné

Je ne sais pas si Jørn Lier Horst est un homme sur lequel on peut compter mais en tant que romancier du Noir, la réponse est oui, dix fois oui. « Le Dossier 1569 » de l’écrivain norvégien en est la preuve absolue. À croire que le parti pris de l’enquête pépère est un gage de talent et de succès.

On retrouve l’inspecteur William Wisting. Il est en vacances. Comme si un policier de ce genre prenait des congés. Quelqu’un doit penser la même chose parce qu’une feuille blanche avec une série de chiffres inscrite en gros, est déposée dans sa boîte aux lettres. Le message fait référence à une vieille affaire qui date de l’été 1999. Tone Vaterland, 17 ans, est tuée en rentrant de son travail à bicyclette. Le coupable est identifié, il s’appelle Daniel Momrak. Il a purgé sa peine. Wisting qui se morfond, contaminé par une nostalgie malheureuse – c’est l’anniversaire de la mort de sa femme disparue dix ans auparavant – se jette sur l’enquête. Rien de mieux qu’un bon cold case pour le sortir de cette torpeur estivale subie.

Et si la justice s’était trompée ? Voilà ce que entrevoit Wisting après avoir longuement étudié le dossier. Il fait nuit, l’inspecteur ne dort pas. Il perçoit le ronronnement d’un véhicule. Il se précipite dehors. Cette fois, c’est une enveloppe. À l’intérieur, encore une feuille pliée avec un numéro de référence. Wisting comprend tout de suite que l’affaire le concerne. Elle date de 2001, soit deux ans après le meurtre de Tone Vaterland. Celle-là, il en avait eu la responsabilité.

Le romancier prend son temps. Par le passé, un autre inspecteur, homme de peu de mots, n’allait guère plus vite. Il s’appelait Kurt Wallander. Il était l’œuvre du voisin suédois Henning Mankell. Il disparut avec son créateur décédé. Il nous reste aujourd’hui Wisting,  méticuleux, habité par le doute. Ne pas prendre pour argent comptant les pistes ou les indices trop évidents est un peu son leitmotiv. Il n’en fait qu’à sa tête. Après tout, il est le héros. Il a aussi une fille, Line, qui a eu un enfant avec un agent américain du FBI, présent dans un précédent roman. Wisting ne pose pas de questions mais veille. Comme ce soir-là, lorsque le copain actuel de Line vient rôder près de chez elle. Lui qui a bien du mal à exprimer ses sentiments avec ses enfants, n’hésite pas à se mêler d’une façon musclée de la vie privée de cette dernière. Parce que autant Wisting sait construire ses enquêtes, quitte à les déconstruire s’il le faut, autant il peine à communiquer avec sa progéniture, et en particulier son fils.

Les intrigues de Jørn Lier Horst sont constituées d’une multitude de chemins qui se croisent et se décroisent. Elles reposent sur la grande humanité d’un personnage attachant et faussement nonchalant. Un grand contemplatif qui regarde le monde tel un enfant en perpétuelle découverte. En réalité, cela cache une peur diffuse d’être dépassé, de ne plus comprendre ce qu’il entoure. La technique au service de l’homme peut elle tout ? Et surtout qui est le plus susceptible de se tromper et d’envoyer des innocents derrière les barreaux. Wisting connaît la réponse.

« Le Dossier 1569 » de Jørn Lier Horst, traduit du norvégien par Céline Romand-Monnier, Éditions Gallimard/Série Noire, 448 pages, 20 euros.

 

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.