« Gangland » de Chuck Hogan : « Toute ma vie, j’avais rêvé d’être un gangster. »

« Réussir un strike est au fond plus facile que de devoir récupérer la dernière quille restée debout toute seule. Tout bon joueur de bowling le savait. » Personne mieux que Nick Passero connaît les règles de ce jeu, lui qui tient désormais un bowling après avoir été un joueur hors pair. Héros magnifique d’un super thriller signé Chuck Hogan, Gangland se situe dans les eaux troubles de la pègre de Chicago dans les années 70/80 et s’intéresse aux petites mains de la mafia. Les fans de cette période apprécieront, les autres découvriront un page-turner de qualité dans un monde de sang, de fric et de frime, de fidélité et de trahison. Tout ça entre deux bonnes assiettes de pâtes à la Bolognaise.

La maison de Sam Giancana est sous surveillance. Le patron de l’Outfit de Chicago fuit les regards depuis son retour forcé aux USA. Il a bien raison. Tout le monde ne lui veut pas du bien. Tout le monde trouve bizarre de pouvoir se pointer comme ça sans être inquiété. Les truands n’aiment pas ça. Et s’il y avait un deal avec le FBI ? Tony Accardo règne désormais sur la ville. Lui qui n’a jamais passé un jour en prison et mourra tranquillement dans son lit en 1992, s’interroge, voire s’inquiète, de ce retour inopiné. Sa botte secrète, son lieutenant Nicky Passero, un gars considéré comme un petit joueur par les types de la mafia. Personne ne se doute qu’il émarge pour le big boss. Personne ne sait qu’il est gay. Sauf un. Roy, le flic, l’agent fédéral qui l’a branché un soir dans un bar gay. Le piège. Une galerie de personnalités issues du monde de la pègre, du chef aux lieutenants ou autre porte flingues et une kyrielle de sous fifres aux ordres de mafieux italiens qui aiment passer l’hiver à Palm Springs à jouer au golf. Un livre en technicolor à la Scorsese, furieusement amoureux de ces gangsters sanguinaires et parfois fragiles comme ce Nick Passero, adepte de tous les secrets. Chuck Hogan dépeint parfaitement la mécanique, voire l’emprise que la Cosa Nostra opère sur les membres de ce club sans existence officielle et légale. Ces petits soldats de l’ombre corsetés dans une masculinité toxique à une époque puritaine où même chez les mafieux le modèle parental demeure papa, maman. Nick Passero a toujours voulu être un gangster, il rêve de grandeur, il veut offrir le meilleur pour son fils. Il ne sera en réalité que le témoin malheureux de sa propre vie.

Noël au soleil. Une habitude pour le boss Tony Accardo. Mais un incident majeur l’oblige à rentrer chez lui. Il y a eu effraction avec des traces d’urine sur le tapis. Quelqu’un a osé faire ça. Les soupçons se portent tout de suite sur Johnny Salita. Il a une solide réputation de voleur de haut vol. Lui et sa bande de marioles viennent tout juste d’avoir braqué la bijouterie Levinson. Ce dernier s’étant plaint auprès d’Accardo, les bijoux ont été récupérés. Mais faut croire que les voleurs n’ont pas apprécié. Nick y voit une occasion en or de prendre du galon. Le boss lui fait confiance. Il est chargé de mettre la main sur Salita et ses hommes. Il lui est demandé de régler le problème une bonne fois pour toute. C’est un peu comme entrer dans la quatrième dimension. Nick et ses acolytes ne sont pas des tueurs. Malaise. Les flics découvrent les cadavres les uns après les autres. Vin, Gonzo, Didi, Joël le Juif. Tous atrocement torturés et balancés dans des coffres de voiture. Une nouvelle Saint- Valentin « mais au ralenti, cette fois ». Pas de mitraillette. Le compte est là : huit cadavres. Les voleurs n’étaient pas aussi nombreux. Quelqu’un de l’Outfit est en train de faire le ménage. Sidéré, Roy a compris que c’était le boss lui-même qui était visé. Nick parvient aux mêmes conclusions.Tragédie urbaine, agneau sacrificiel, Nick Passero le héros tourmenté devra choisir afin de mettre sa famille à l’abri, afin de vivre. Afin d’exister réellement. Sans fard. Ailleurs.

Gangland de Chuck Hogan, traduit de l’Anglais (États-Unis) par Suzy Borello, Éditions Calmann Lévy Noir, 416 pages, 22,90 euros.

 

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