« Sans l’ombre d’un doute » de Michael Connelly : on ne s’en lasse pas

Mais comment fait-il ! Autant de constance et de qualité. Michael Connelly sort son 45ème roman avec ses deux héros fétiches Harry Bosch et son demi-frère Mickey Heller, à jamais immortalisé par l’acteur texan, Matthew McConaughey dans le film La Défense Lincoln. « Sans l’ombre d’un doute » nous donne quelques éléments de réponse.

Il y a un héros qui ne meurt jamais. Harry Bosch, malade d’un cancer, retraité du LAPD mais toujours prêt à remettre un petit coup de collier. Parce que les méchants n’attendent pas. Il y a aussi un autre héros encore en construction. On le devine carrément dans cette nouvelle intrigue. Mickey Heller qui vient de faire libérer un innocent, a envie de se défaire de ses vieux oripeaux d’avocat de la défense sans foi ni loi, pour ceux plus nobles de redresseur de torts envers les accusés que la justice américaine a mis en tôle, faute de moyens ou autre. Ajoutez une parfaite maîtrise des rouages policiers et juridiques et un savoir-faire fictionnel quasi parfait, vous avez une grande partie de la réponse. Reste le mystère de la création, la propre inspiration sans cesse renouvelée de l’auteur, et vous ressortez de votre lecture enchantée avec une furieuse envie de lire le prochain Michael Connelly.

Dans la presse, on appelle ça un angle. C’est exactement ce que travaille le romancier américain, lui qui commença comme journaliste justice/police. Creuser cet angle d’un nouveau Mike Heller. Pour cela, il lui faut atténuer la réticence d’un Harry Bosch, flic indécrottable, à coopérer de plus en plus franchement avec la défense. Nous assistons à la métamorphose lente mais continue de deux individus liés par le sang mais que tout opposait jusqu’ici professionnellement parlant. Dans la masse des dossiers suivis par Heller un en particulier retient l’attention de Bosch. Celui d’une mère accusée d’avoir tué son ex-mari, adjoint des services du shérif. Autant dire un cas perdu d’avance, le commun des mortels n’ayant en général aucune chance face à la machine de guerre de la police.

Mais la lettre que Lucinda Sanz envoie à Heller et que Bosch lui soumet ouvre des perspectives. Le ton est de bon augure. Elle clame son innocence mais ne désigne personne. Elle demande juste de l’aide. Bosch suit son intuition. Et nous ses pérégrinations mentales et géographiques. Parce que lire du Connelly, c’est aussi se mouvoir en voiture dans la ville tentaculaire et en expansion permanente de Los Angeles, Californie. Quartz Hill, par exemple, la banlieue de la banlieue de Palmade au nord-est du comté, jadis une petite ville du désert, désormais elle abrite une population dépassée par les prix de l’immobilier de LA. Mais les nouveaux voisins ne sont pas les plus tranquilles. Ce sont les gangs et les junkies. C’est là que Roberto Sanz est mort, alors qu’il ramenait son fils au domicile de son ex-femme.

La suite relève de la virtuosité sans cesse renouvelée de l’écrivain. Évidemment que Bosch va soulever des lièvres, que Heller va faire des miracles et que tout finira bien. Mais ce qui surprend toujours dans les romans de cet auteur, c’est cette faculté qu’il a de nous faire naviguer encore et encore dans le système légal américain. Quasiment au pas désormais plus lent de son héros, Hieronymus Bosch, et qui se bat autant contre la maladie que contre la vieillesse. La faculté qu’il a aussi de mettre en valeur les personnages et d’ouvrir des portes. La dernière éclaire Mickey Heller. On entrevoit une transformation personnelle, sans doute plus en adéquation avec l’état d’esprit très légaliste de son demi-frère Bosch. Une jolie transition pour le nouveau scénario, sans l’ombre d’un doute, déjà mijoté par Michael Connelly.

« Sans l’ombre d’un doute » de Michael Connelly, traduit de l’Anglais (États-Unis) par Robert Pépin, Éditions Calmann-Lévy Noir, 450 pages, 22,90 euros.

 

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